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DE LA MÉTAPHYSIQUE DES MŒURS


même ut devoirs envers autrui, et, des uns et des autres, en devoirs parfaits et devoirs imparfaite 1[1].

Un homme, réduit au désespoir pur une suite de malheurs, a pris la vie en dégoût ; mais il est encore assez maître de sa raison pour pouvoir se demander s’il n’est pas contraire au devoir envers soi-même d’attenter à sa vie. Or il cherche si la maxime de son action peut être une loi universelle de la nature. Voici sa maxime : j’admets en principe, pour l’amour de moi-même, que je puis abréger ma vie, dès qu’en la prolongeant j’ai plus de maux à craindre que de plaisirs à espérer. Qu’on se demande si ce principe de l’amour de soi peut devenir une loi universelle de la nature. On verra bientôt qu'une nature qui aurait pour loi de détruire la vie, par ce même penchant dont le but est de la conserver, serait en contradiction avec l’harmonie, ni ainsi ne subsisterait pas comme nature ; d’où il suit que cette maxime ne peut être considérée comme une lui universelle de la nature, et, par conséquent, est tout à fait contraire au principe suprême de tout devoir.

2. Un autre est poussé par le besoin à emprunter de l’argent. Il sait bien qu’il ne pourra pus le rendre,

  1. 1 Je dois faire remarquer que je me réserve de traiter plus tard de la division des devoirs dans une métaphysique des mœurs, et que je ne suis ici la division ordinaire que parce qu’elle m’est commode (pour coordonner mes exemples). D’ailleurs j’entends ici par devoirs parfaits, ceux qui ne souffrent aucune exception en faveur de l’inclination, et je n’en admet pas seulement d'extérieurs mais aussi d’intérieurs ce qui est contraire à l’acception reçue dans l'école mais je n’ai pas besoin ici de justifier cette opinion, car, qu’on l’admette ou qu’on la rejette, cela ne fait rien pour le but que je me propose.