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FONDEMENTS


rité et de consistance. L’homme seul en lui-même dans ses besoins et ses penchants, dont il désigne la complète satisfaction sous le nom de bonheur, un puissant contre-poids à tous lis commandements du devoir, que sa raison lui présente comme quelque chose de si respectable. La raison cependant ordonne sans transiger avec les inclinations ; elle, repousse impitoyablement et avec mépris toutes leurs prétentions si tumultueuses, et en apparence si bien fondées qu’aucun ordre ne peut étouffer. Or de là résulte une dialectique naturelle, c'est-à-dire un penchant à sophistiquée contre les lois sévères du devoir, à mettre en doute leur valeur, ou au moins leur pureté et leur sévérité, et à les accommoder autant que possible à nos désirs et à nos inclinations, c'est-à-dire à les corrompre dans leur source et à leur enlever toute leur dignité, c que pourtant la raison pratique de tous les hommes finira toujours par condamner.

Si donc la raison commune est poussée à s'élever au dessus de sa sphère, ce n’est point par un besoin de la spéculation car elle ne sent pas ce besoin tant qu’elle se contente de rester la saine et droite raison, mais par des motifs pratiques. En effet, elle ne met le pied dans le champ de la philosophie pratique, que pour y puiser des explications et des éclaircissements sur la source et la vraie détermination de son principe, en opposition aux maximes qui se fondent sur les besoins et les inclinations, afin de pouvoir se tirer d'embarras en présence de prétentions opposées, et de ne pas courir le risque de perdre dans les équivoques, où elle tombe aisément, tous