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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


dignité. Ce dont l’absence augmente l’effet d’une force motrice doit être regardé comme un obstacle. Par conséquent, toute addition des mobiles, tirés de considération de notre bonheur personnel, est un obstacle à l’influence que la loi morale peut exercer sur le cœur humain. — Je soutiens en outre que, même dans cette admirable action, si l’on ne suppose d’autre motif que la considération du devoir, ce respect de la loi agira bien plus fortement sur l’âme de l’auditeur que ne pourrait faire une sorte de prétention à la grandeur d’âme, à des sentiments nobles et méritoires *[1], et que, par conséquent, c’est le devoir, et non pas le mérite **[2], qui produit sur l’âme, non-seulement l’influence la plus déterminée, mais même, si l’on en montre bien toute la majesté, l’influence la plus puissante.

De nos jours, où l’on croit qu’avec des sentiments qui amollissent et gonflent le cœur, et qui l’affaiblissent au lieu de le fortifier, on dirigera mieux les esprits qu’avec la pure et sévère représentation du devoir, qui convient beaucoup mieux à l’imperfection de la nature humaine et à ses progrès dans la voie du bien, il est plus nécessaire que jamais d’enseigner cette méthode. Il est tout à fait absurde de proposer pour modèles aux enfants des actions qu’on leur présente comme nobles, magnanimes, méritoires, dans l’espoir de les pousser à des actions semblables par l’influence de l’enthousiasme ; car, en les rendant dé-

  1. * verdienslich.
  2. ** Verdienst.