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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


dessein de restreindre ce jugement aux conditions objectives de notre raison, afin de ne faire usage de cette restriction que quand le mode d’adhésion qui convient ici serait mieux déterminé. Dans le fait cette impossibilité est purement subjective, c’est-à-dire que notre raison trouve qu’il lui est impossible de concevoir, en s’en tenant au cours de la nature, une harmonie parfaite et continue entre des choses qui se produisent dans le monde suivant des lois si distinctes, quoiqu’ici, comme partout où la nature montre quelque finalité, elle ne puisse prouver que cette harmonie est impossible suivant des lois universelles de la nature, c’est-à-dire démontrer suffisamment cette impossibilité par des raisons objectives.

Mais voici maintenant en jeu un motif d’une autre espèce, qui met un terme à l’indécision de la raison spéculative. L’ordre de réaliser le souverain bien est fondé objectivement (dans la raison pratique), et la possibilité du souverain bien est aussi fondée en général objectivement (dans la raison théorique qui n’a rien à y objecter). Mais la raison ne peut décider objectivement de quelle manière nous devons nous représenter cette possibilité, si nous pouvons la rapporter à des lois universelles de la nature, sans invoquer une cause sage qui y préside, ou si nous devons supposer une telle cause. Or ici se présente une condition subjective de la raison : c’est à savoir la seule manière théoriquement possible pour elle, et il faut ajouter une manière qui ne sert qu’à la moralité (laquelle est soumise à une loi objective de la raison), de concevoir l’harmonie par-