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DU CONCEPT DU SOUVERAIN BIEN.

fond serait vide et sans objet. Or les postulats précédents ne concernent que les conditions physiques ou métaphysiques, d’un seul mot les conditions qui résident dans la nature des choses, de la possibilité du souverain bien : ils ne servent pas à un but arbitraire de la spéculation, mais à un but pratiquement nécessaire de la volonté rationnelle pure, laquelle ici ne choisit pas mais obéit à un ordre inflexible de la raison qui a son fondement objectivement, dans la nature des choses en tant qu’elles doivent être jugées universellement par la raison pure et non pas dans quelque inclination, car pour les choses que nous souhaitons par des raisons purement subjectives, notre inclination ne nous autorise nullement à admettre comme possibles les moyens de les obtenir ou ces choses mêmes comme réelles. Il y a donc là un besoin absolument nécessaire[1], et la supposition qui s’y fonde n’est pas seulement une hypothèse permise, mais un postulat pratique ; et, si l’on accorde que la loi morale pure est un ordre inflexible qui oblige tout homme non une règle de prudence, l’honnête homme peut dire : je veux qu’il y ait un Dieu, que mon existence en ce monde soit encore, outre son rapport avec la nature une existence dans un monde purement intelligible, enfin que ma durée suit infinie ; je m’attache à ces croyances et ne les abandonnerai pas, car c’est ici le seul cas où mon intérêt, dont il ne m’est ici permis de rien rabattre détermine inévitablement mon jugement, sans

  1. ein Bedürfnis in schlechterdings nohtir endiger Absicht.