Page:Kant-Critique de la raison pratique, trad. Barni, 1848.djvu/371

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
362
CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


pratique est fondé sur un devoir, sur le devoir de prendre quelque chose (le souverain bien) pour objet de sa volonté et de travailler de toutes ses forces à le réaliser, et il faut bien alors que je suppose la possibilité de cet objet, et, par conséquent aussi, les conditions nécessaires à sa possibilité, à savoir Dieu, la liberté et l’immortalité, car, si je ne puis les réfuter, je ne puis non plus les prouver par ma raison spéculative. Ce devoir se fonde sur une loi entièrement indépendante de toute supposition de ce genre, sur une loi qui est par elle-même apodictiquement certaine, c’est-à-dire sur la loi morale, et il n’a pas besoin, par conséquent, de chercher un appui étranger dans l’opinion théorique que nous pouvons nous faire de la nature intérieure des choses, du but secret de l’ordre du monde, ou de l’intelligence qui le gouverne, pour nous obliger de la manière la plus parfaite à des actions absolument légitimes. Mais l’effet subjectif de cette loi, à savoir l’intention, conforme à cette loi et par elle aussi rendue nécessaire, de réaliser le souverain bien pratiquement possible suppose au moins que celui-ci est possible, car il serait pratiquement impossible de poursuivre l’objet d’un concept qui au

    blématique quoiqu’inévitable, à savoir le concept d’un être absolument nécessaire. Or ce concept veut être déterminé, et voilà, si l’on ajoute la tendance à l’extension, le fondement objectif d’un besoin de la raison spéculative, c’est-à-dire du besoin de déterminer avec plus de précision le concept d’un être nécessaire, qui doit servir de principe à tous les autres, et, par conséquent, de connaître cet être de quelque manière. Sans ces problèmes nécessaires et antérieurs, il n’y a pas de besoin, du moins de la raison pure : les autres sont des besoins de l’inclination.