Page:Kant-Critique de la raison pratique, trad. Barni, 1848.djvu/330

Cette page a été validée par deux contributeurs.
321
DU CONCEPT DU SOUVERAIN BIEN.


rieur, qui servirait de principe à la raison (puisque ce sentiment serait toujours esthétique et pathologique) ; comme conscience de la contrainte immédiate exercée par la loi sur la volonté, il est à peine un analogue du sentiment du plaisir, quoique, dans son rapport avec la faculté de désirer, il produise ce même sentiment, mais d’une façon toute particulière. Telle est l’unique manière de voir qui permette d’obtenir ce que l’on cherche, c’est-à-dire dans laquelle les actions ne soient pas simplement conformes au devoir (à cause des sentiments agréables qu’elles nous promettent), mais faites par devoir, ce qui doit être le véritable but de toute culture morale.

Mais n’y a-t-il pas une expression qui désigne, non une jouissance, comme le mot bonheur, mais pourtant une satisfaction attachée à l’existence, un analogue du bonheur qui doit nécessairement accompagner la conscience de la vertu ? Oui, et cette expression est celle de contentement de soi-même *[1], qui dans son sens propre ne désigne jamais qu’une satisfaction négative qu’on trouve dans son existence, par cela seul qu’on a conscience de n’avoir besoin de rien. La liberté, ou la faculté que nous avons de nous résoudre invinciblement à suivre la loi morale, nous rend indépendants des penchants, au moins comme causes déterminantes de notre désir (sinon comme causes affectives), et la conscience que nous avons de cette indépendance dans la pratique de nos maximes morales est l’unique source

  1. * Selbstzufriedenheit.
21