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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


ner à l’identité, pour n’y voir qu’une querelle de mots, et établir ainsi, en apparence, l’unité du concept, dans lequel on ne reconnaît plus que des distinctions nominales. C’est ce qui arrive ordinairement dans les cas où la liaison de principes hétérogènes est si profondément cachée, ou exigerait un si complet changement de doctrine dans le système philosophique déjà admis, qu’on a peur de pénétrer un peu avant dans la différence réelle, et qu’on aime mieux n’y voir qu’une différence toute formelle.

Tout en cherchant également à montrer l’identité des principes pratiques de la vertu et du bonheur, ces deux écoles ne s’accordaient pas sur la manière de l’établir, mais elles différaient infiniment : l’une prenait le côté esthétique, l’autre le côté logique ; celle-là plaçait son principe dans la conscience des besoins de la sensibilité, celle-ci dans la conscience d’une raison pratique indépendante de tous les principes sensibles de détermination. Le concept de la vertu, suivant les épicuriens, est déjà contenu dans la maxime qui prescrit de rechercher son propre bonheur ; suivant les stoïciens au contraire, c’est le sentiment du bonheur qui est déjà contenu dans la conscience de la vertu. Mais ce qui est contenu dans un autre concept est à la vérité identique avec une partie du contenant, mais non pas avec le tout, et, alors même que deux tous sont formés des mêmes parties, ils peuvent encore être spécifiquement distincts, si les parties qui les constituent sont unies dans chacun d’une manière différente. Les stoïciens soutenaient que la vertu est tout le souverain