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DU CONCEPT DU SOUVERAIN BIEN.


à fait identiques, en sorte qu’on n’a pas besoin de donner à la première d’autres maximes qu’à la seconde ; ou bien la vertu produit le bonheur comme quelque chose de tout à fait distinct de la conscience de la vertu, comme la cause son effet.

Parmi les anciennes écoles de la Grèce, il y en eut deux qui suivirent la même méthode dans la détermination du concept du souverain bien, c’est-à-dire ne regardèrent point la vertu et le bonheur comme deux éléments distincts du souverain bien, et, par conséquent, cherchèrent l’unité du principe suivant la règle de l’identité, mais elles se distinguèrent par le choix du concept qu’elles prirent pour fondement. Les épicuriens disaient : avoir conscience de suivre des maximes qui conduisent au bonheur, voilà la vertu ; les stoïciens : avoir conscience de sa vertu, voilà le bonheur. Pour les premiers prudence signifiait moralité ; pour les seconds, qui donnaient à la vertu une signification plus élevée, la moralité était seule la vraie sagesse.

On doit regretter que la pénétration de ces hommes (qui n’en sont pas moins admirables pour avoir tenté dans ces temps reculés toutes les routes possibles du domaine philosophique), se soit malheureusement appliquée à chercher de l’identité entre des concepts entièrement distincts, celui de la vertu et celui du bon heur. Mais il était conforme à l’esprit dialectique de ces temps, et maintenant encore cela séduit parfois des esprits subtils, de supprimer dans les principes des différences essentielles et qu’il est impossible de rame-