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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


en tant qu’elle peut nous être utile dans la recherche de ce concept, comme aussi du principe pratique qui doit déterminer notre volonté, mais il aurait l’avantage de ne pas nous laisser perdre de vue le but suprême qui seul a valu à la philosophie *[1] son nom. D’autre part, il ne serait pas mal de confondre la présomption de celui qui ose s’arroger le titre de philosophe **[2], en lui présentant par la définition même de ce mot une mesure d’estimation de soi-même, qui rabattrait fort ses prétentions. Car être philosophe ***[3] dans ce sens, ce serait être quelque chose de plus qu’un simple disciple qui n’est pas allé encore assez loin pour être en état de se conduire lui-même, et bien moins encore de conduire les autres, avec la certitude d’atteindre un but si élevé ; ce serait être maître dans la connaissance de la sagesse, ce qui signifie plus que ce qu’un homme modeste n’en doit dire de lui-même. La philosophie resterait alors, comme la sagesse, un idéal, qui, objectivement n’est représenté complètement que dans la raison, mais qui, subjectivement, par rapport à la personne, n’est autre chose que le but de ses constants efforts. Celui-là seul aurait le droit de se croire en possession de cet idéal et de s’arroger en conséquence le titre de philosophe, qui pourrait en montrer, comme exemple, l’effet infaillible en sa personne (dans l’empire qu’il

  1. * Weisheitslehre. Voyez la note précédente.
  2. ** Ici Kant se sert du mot philosophe.
  3. *** Précisément pour rappeler la définition du mot philosophe, Kant emploie ici l’expression Weisheitslehrer ; mais, comme la langue française n’a que ce mot, je suis forcé de le répéter.
    J. B.