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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


devoir, et, d’autre part, la privation du bonheur (par exemple, la pauvreté) pousse l’homme à y manquer. Seulement ce ne peut jamais être immédiatement un devoir de travailler à notre bonheur, et bien encore moins le principe de tous les devoirs. Or, comme tous les principes déterminants de la volonté, excepté la loi de la raison pure pratique (la loi morale) sont empiriques, et à ce titre se rattachent au principe du bonheur, il les faut tous séparer du principe suprême moral, et ne jamais les y incorporer comme condition, car ce serait détruire toute valeur morale, tout comme le mélange d’éléments empiriques avec des principes géométriques détruirait toute évidence mathématique, c’est-à-dire (au jugement de Platon) ce qu’il y a de plus excellent dans les mathématiques, et ce qui surpasse même leur utilité.

Pour ce qui est de la déduction du principe suprême de la raison pure pratique, c’est-à-dire de l’explication de la possibilité d’une telle connaissance a priori, tout ce qu’on pouvait faire, c’était de montrer que, en considérant la possibilité de la liberté d’une cause efficiente, on aperçoit aussi, non-seulement la possibilité, mais encore la nécessité de la loi morale, comme principe pratique suprême des êtres raisonnables, à la volonté desquels on attribue une causalité libre, parce que ces deux concepts sont si inséparablement unis, qu’on pourrait définir la liberté pratique l’indépendance de la volonté par rapport à toute loi autre que la loi morale. Mais nous ne pouvons nullement apercevoir la possibilité de la liberté