est contraire à l’usage de la langue *[1], qui distingue l’agréable du bien **[2], le désagréable du mal ***[3], et qu’on exige que le bien et le mal ****[4] soient toujours déterminés par la raison, par conséquent, par des concepts, qui puissent être universellement partagés, et non par la seule sensation, qui est restreinte à des objets individuels et à la manière dont ils nous affectent, et, comme, d’un autre côté, une peine ou un plaisir ne peut être immédiatement lié par lui-même a priori à la représentation d’un objet, le philosophe qui se croirait obligé de donner pour fondement à ses jugements pratiques un sentiment de plaisir, appellerait bon ce qui est un moyen pour l’agréable, et mauvais ce qui est la cause du désagréable et de la douleur ; car le jugement que nous portons sur le rapport de moyens à fins appartient certainement à la raison. Mais, quoique la raison soit seule capable d’apercevoir la liaison des moyens avec leurs fins (de telle sorte qu’on pourrait définir la volonté la faculté des fins, puisque les causes déterminantes de la faculté de désirer, quand elle agit suivant des principes, sont toujours des fins), cependant les maximes pratiques qui dériveraient comme moyens du principe du bien dont il s’agit, ne donneraient jamais pour objet à la volonté quelque chose de bon en soi, mais seulement quelque chose de bon pour quelque autre chose : le bien ne serait plus alors que l’utile ; et, ce à quoi il serait utile,
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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.