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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


vos forces *[1], la conscience de l’énergie de notre âme dans sa lutte contre les obstacles qui s’opposent à ses desseins, la culture des talent de l’esprit, etc., toutes ces choses peuvent nous causer du plaisir, et nous disons avec raison que ce sont là des joies et des jouissances délicates **[2], parce qu’elles sont plus en notre pouvoir que d’autres ; qu’elles ne s’usent point, mais se fortifient au contraire par l’habitude, et que, tout en charmant l’âme, elles la cultivent. Mais les donner pour une espèce de mobiles de la volonté différents du ceux qui viennent des sens quand on suppose, pour en expliquer la possibilité, un sentiment qui nous rend propres à les recevoir et qui en est la première condition, c’est faire comme ces ignorants qui, s’ingérant de faire de la métaphysique, subtilisent la matière au point d’en avoir pour ainsi dire le vertige, et croient qu’ils se font ainsi une idée d’un être spirituel et pourtant étendu. Si l’on admet avec Epicure que la vertu ne détermine la volonté que par le plaisir qu’elle promet, on n’a pas le droit de le blâmer ensuite d’avoir regardé ce plaisir comme tout à fait semblable à ceux des sens les plus grossiers ; car c’est à tort qu’on lui impute d’avoir attribué uniquement aux sens corporels les représentations par lesquelles ce sentiment est excité en nous. Il a cherché, autant qu’on peut la conjecturer, la source de beaucoup de représentations dans une faculté de connaître supérieure, mais cela ne l’empêchait pas et ne pouvait l’empêcher de regarder, d’après le principe indiqué,

  1. * Kraftamceudung.
  2. ** feinere.