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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


la volonté d’un être raisonnable, mais soumis à des affections pathologiques *[1], un conflit peut s’engager entre les maximes et les lois pratiques qu’il reconnaît lui-même. Quelqu’un, par exemple, peut se faire une maxime de ne souffrir impunément aucune offense, et reconnaître cependant que ce n’est pas là une loi pratique, mais seulement une maxime particulière, et qu’on ne peut, sans contradiction, en faire une règle pour la volonté de tous les êtres raisonnables. Dans la connaissance physique, les principes de ce qui arrive (par exemple le principe de l’égalité de l’action et de la réaction dans la communication du mouvement) sont en même temps des lois de la nature ; car l’usage de la raison y est théorique et déterminé par la nature de l’objet. Dans la connaissance pratique, c’est-à-dire dans celle qui ne s’occupe que des principes déterminants de la volonté, les principes, qu’on se fait, ne sont pas pour cela des lois qu’on suive inévitablement, car la raison a ici affaire au sujet, c’est-à-dire à la faculté de désirer, dont la nature particulière peut modifier diversement la règle. — La règle pratique est toujours un produit de la raison, puisqu’elle prescrit l’action comme moyen d’arriver à un effet qu’on se propose pour but. Mais, pour un être chez qui la raison n’est pas le seul principe déterminant de la volonté, cette règle est un impératif, ou une règle qui se traduit par un « doit être **[2] », lequel désigne la nécessité objective de l’action, c’est-à-dire que si la raison déterminait entièrement la volonté, l’action serait infailliblement

  1. * pathologisch-afficirten.
  2. ** Durch ein Sollen.