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CRITIQUE DE LA RAISON PRATIQUE.


cept faux et comme une pure illusion de l’esprit. Essaiera-t-on de remédier à ce défaut de valeur objective, et, par conséquent, d’universalité, en disant qu’on ne voit pas pourquoi on attribuerait à d’autres êtres raisonnables un autre mode de connaissance ; si cette manière de raisonner avait quelque valeur, notre ignorance nous serait plus utile, pour étendre notre connaissance, que toutes les réflexions possibles. En effet, par cela seul que nous ne connaissons pas d’autres êtres raisonnables que l’homme, nous aurions le droit de les admettre tels que nous nous connaissons nous-mêmes, c’est-à-dire que nous les connaîtrions réellement. Je ne rappellerai même pas ici que le consentement universel ne prouve pas la valeur objective d’un jugement (c’est-à-dire sa valeur comme connaissance), et que, quand bien même cette universalité se rencontrerait accidentellement, elle ne serait pas une preuve de l’accord du jugement avec l’objet, mais que c’est au contraire dans la valeur objective du jugement que réside le principe d’un consentement nécessaire et universel.

Hume s’accommoderait fort bien de ce système d’empirisme universel dans les principes, car il ne demandait rien autre chose, comme on sait, sinon qu’au lieu de donner un sens objectif à la nécessité du concept de cause, on l’admit dans un sens subjectif, c’est-à-dire comme une habitude, afin de refuser à la raison tout jugement sur Dieu, la liberté et l’immortalité ; et il faut convenir qu’il s’est montré si habile logicien que, si une fois on lui accorde les principes, il faut lui accorder aussi les conséquences qu’il en