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PRÉFACE.

Ce qu’il pourrait arriver de plus fâcheux à ces sortes de recherches, ce serait que quelqu’un découvrît inopinément qu’il n’y a ni ne peut y avoir de connaissance a priori. Mais il n’y a pas ici le moindre danger. C’est comme si quelqu’un voulait démontrer par la raison qu’il n’y a pas de raison. En effet nous disons que nous connaissons une chose par la raison, lorsque nous avons la conscience que nous aurions pu la connaître, quand même elle ne nous aurait pas été donnée dans l’expérience ; par conséquent, connaissance rationnelle et connaissance a priori sont choses identiques. D’un principe de l’expérience vouloir tirer la nécessité (ex punice aquam), et vouloir par là donner à un jugement la véritable universalité (sans laquelle il n’y a pas de raisonnement, pas même de raisonnement par analogie, car l’analogie suppose une universalité du moins présumée et une nécessité objective), c’est une contradiction manifeste. Substituer la nécessité subjective, c’est-à-dire l’habitude à la nécessité objective, qui ne peut se trouve ? que dans des jugements a priori, c’est refuser à la raison la faculté de juger de l’objet, c’est-à-dire de le connaître lui et ce qui s’y rapporte, et prétendre, par exemple, que, quand une chose suit souvent ou toujours une autre chose, nous ne pouvons conclure de celle-ci à celle-là (car ce raisonnement annoncerait une nécessité objective et le concept d’une liaison a priori), mais que nous pouvons seulement attendre des cas semblables (de la même manière que les animaux), ce qui est détruire le concept de cause, comme un con-