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FONDEMENTS


penserait absolument rien ; tandis que la raison révêle dans ce que j’appelle les idées une spontanéité si pure, que par elle l’homme s’élève bien au delà de ce que la sensibilité peut lui fournir, et que sa principale fonction consiste à distinguer le monde sensible et le monde intelligible, et par là à tracer à l’entendement lui-même ses limites.

C’est pourquoi un être raisonnable doit se considérer lui-même, en tant qu’intelligence (et non pas du côté de ses facultés inférieures), comme appartenant au monde intelligible, et non au monde sensible. Il a donc deux points de vue d’où il peut se considérer lui même et reconnaître les lois de l’exercice de ses facul tés, et, par conséquent, de tous ses actes ; d’un côté, en tant qu’il appartient au monde sensible, il se voit soumis aux lois de la nature (hétéronomie) ; de l’autre, en tant qu’il appartient au monde intelligible, il se voit soumis à des lois indépendantes de la nature, ou qui ne sont pas empiriques, mais fondées uniquement sur la raison.

Comme être raisonnable, et partant appartenant au monde intelligible, l’homme ne peut concevoir la causalité de sa propre volonté que sous la condition de l’idée de la liberté ; car l’indépendance des causes déterminantes du monde sensible (indépendance que doit toujours s’attribuer la raison) est la liberté. Or à l’idée de la liberté est inséparablement lié le concept de l’autonomie, et à celui-ci le principe universel de la moralité, lequel, dans l’idée *[1], sert de fondement à

  1. * in der Idee.