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se bornait à mentionner l’inspection de l’hôpital militaire et une excursion aux bains sulfureux de Dogo.

Une averse diluvienne nous obligea à recourir, pour cette tournée, aux services de kouroumas poussifs ; et lorsque, arrivés à destination, les coolies firent tomber le tablier de toile cirée qui nous barrait la vue, nous ne fûmes pas médiocrement étonnés de nous trouver devant la porte d’un temple bouddhiste. Quel bizarre hôpital ! Un corps de garde a été construit près de l’entrée ; une escouade de fantassins s’y sèche autour d’un poêle en fonte. Plus loin, la cour qui précède l’édifice est coupée en deux par une clôture en bois de deux mètres de haut, au-dessus de laquelle apparaît la pointe du toit de tuiles grises reluisant sous la pluie. Nous la franchissons, et la vérité se révèle soudain à nos yeux sous la forme d’une centaine de paires de bottes, alignées avec la régularité de soldats prussiens. Ce ne sont pas des malades, mais des gens fort bien portants qu’on va nous faire voir.

Je ne sais pourquoi, avant d’entrer, je suis resté à regarder les énormes chaussures noires des fusiliers russes. Elles me font penser aux combats des siècles passés, aux guerres de l’Empire et plus encore à celles de Frédéric II ou du maréchal de de Saxe. C’était alors le temps des lignes d’infanterie