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— Oh ! c’est toute une histoire. Le 28, pendant qu’on se battait à Anchantien, une députation de notables vint se présenter à Kouropatkine, et lui demanda humblement l’autorisation pour les habitants de quitter la ville. Le général en chef les reçut en souriant et, très surpris, leur demanda ce qui pouvait leur avoir donné une pareille idée.

« — Mais on se bat, non loin d’ici.

» — Comment, on se bat ?

» — En ce moment même, nous entendons le bruit du canon.

» — Ah ! vous faites allusion à ces quelques Japonais. N’en parlons pas, ils n’en valent pas la peine. On leur donne une petite correction, mais ce n’est pas votre affaire. Vous pouvez vous retirer.

» Le 30, pendant le combat de Chiouchanpou, nouvelle députation, nouveau sourire étonné du général.

» — Les Japonais approchent, Excellence. On voit les obus éclater sur la montagne.

» — Ne vous occupez donc pas de ces détails et demeurez tranquillement chez vous. Allez plutôt près de la pagode, à la promenade ; la musique militaire y joue justement aujourd’hui ses meilleurs morceaux. Voilà comment nous nous soucions de ces singes.

» — Mais pourtant, Excellence…