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tranchées ennemies, à huit cents mètres de là, un feu languissant. Je laissai l’officier d’artillerie continuer ses recherches et me couchai à côté de deux lieutenants. Tout l’après-midi se passa ainsi, sans autre incident que l’arrivée d’un bataillon de réserve qui perdit pas mal de monde en commettant la maladresse de se déployer sous le feu.

J’aurais voulu bivouaquer sur place avec ce régiment, mais une conversation avec un des officiers me fit préférer un autre gîte. La voici :

— Vous êtes Français, monsieur ?

— Oui, monsieur.

— Il y a eu un très grand général en France, n’est-ce pas ?

— Certainement, il y en a même eu plusieurs.

— Oui, mais un plus grand que tous les autres, celui qui s’appelait Napoléon.

— Eh bien ?

— Eh bien, nous sommes les plus grands généraux du monde, puisque les Russes ont battu Napoléon et que nous avons battu les Russes.

— Où avez-vous appris l’histoire ?

— Au Collège militaire.

— Permettez-moi de vous dire que les professeurs y sont fort mauvais ou que vous n’avez pas retenu leurs leçons, car Napoléon a souvent battu les Russes, mais ne l’a jamais été par eux. En outre, la guerre