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vite qu’elle peut ; les Russes augmentent également l’intensité du feu, les hommes tombent autour de nous. Mais on n’entend plus ni le sifflement des balles, ni le crépitement de la mousqueterie, ni les grondements plus lointains du canon. Debout maintenant pour mieux voir, nous n’avons d’attention que pour le combat acharné qui se livre à huit cents mètres de nous. Toute la ligne japonaise est illuminée par l’éclair de l’acier sortant des fourreaux. C’est la dernière phase, c’est l’assaut. Les officiers, une fois de plus, quittent l’abri au cri de banzaï, répété par tous les assaillants. Ils progressent péniblement, mais sûrement, malgré les réseaux de fil de fer, les trous de loup et la fusillade inexorable ; des unités sont détruites, d’autres les remplacent ; le flot s’abat par instant, mais avance toujours. Les voilà à quelques mètres des tranchées ; alors du côté russe, la longue ligne grise des fusiliers sibériens se dresse à son tour, envoie une dernière salve sur l’ennemi, et descend en courant le revers de la montagne.

Notre compagnie redouble son feu sur l’ennemi en retraite, puis elle quitte, elle aussi, ses abris, et court à la poursuite. Mais le feu de la position en échelon nous prend en flanc. La compagnie est décimée en un instant. Le capitaine a son képi traversé par une balle, le sous-lieutenant est blessé à la main, le lieu-