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pent sur mes talons. Les éperons poussés dans le flanc des bêtes leur font donner toute leur vitesse. Nos poneys mandchous fatigueraient vite les haridelles japonaises de nos geôliers s’ils tentaient de nous poursuivre. Aussi nous jugeons bientôt que nous sommes hors d’atteinte. Le sentier se rétrécit, puis cesse brusquement, et nous voilà errants dans la forêt touffue du gaolian ; bien malin qui pourra nous y retrouver.

Je ralentis l’allure et me retourne : la plupart des correspondants n’ont pas persévéré, il n’y en a plus que deux derrière moi.

Bientôt le sorgho s’éclaircit et nous met en présence de la rivière Tchaho. Les berges sont boueuses, difficiles à aborder ; il faut tâtonner longtemps avant de trouver un banc de sable où les traces récentes de roues indiquent un gué propice. Un peu au delà du cours d’eau, je monte à mes compagnons un monticule couronné de pins qui nous servira de premier observatoire et nous permettra de reconnaître notre position exacte.

Nous mettons pied à terre pour escalader la pente le long du mur d’un temple bouddhiste. Au sommet, une vingtaine de paysans chinois, confortablement assis sur de grosses pierres, regardent la bataille sans s’émouvoir.

Un premier coup d’œil me convainc que nous