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en est faite, nous allons fraterniser avec nos compagnons d’infortune et mêler nos lamentations aux leurs. Au brouillard succède la pluie, le vent nous apporte périodiquement le grondement indistinct de la canonnade. Transis et affamés, nous demandons en vain un abri ; l’ordre est de rester là jusqu’au soir et nous y restons. Dix heures de douche sans rien voir, tel est le triste bilan de cette seconde journée.


Anchantien, 28 août.

Ce matin, notre doyen, le dessinateur anglais Mellon Prior, fatigué de ne crayonner que des pagodes et des mendiants chinois, a demandé son passeport pour rentrer en Europe. Les deux romanciers américains le suivent dans sa retraite.

Avant de partir, ces déserteurs laissent à chacun de nous comme souvenir un ustensile de leur matériel de campagne. J’hérite pour ma part d’un volumineux emporte-pièce qui pourra au besoin me servir de casse-tête.

Nous suivons aujourd’hui la grande route mandarine le long du chemin de fer ; elle est couverte de convois portant aliments et munitions aux combattants. Devant nous se dressent les hauteurs d’Anchantien, excellente position que les Russes, menacés sur leur