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et va se plaindre au commandant du poste, accouru au bruit. Mais mon attitude résolue désarme les plus vaillants et personne n’ose venir me détrôner de mon char.

L’étape est d’un tiers plus courte que la précédente, mais le soleil la rend plus pénible encore. Mes camarades qui n’ont cessé depuis Modji de se moquer de moi parce qu’ils ont découvert un parapluie dans mes bagages, regardent maintenant d’un œil jaloux le dôme de soie qui m’abrite. Le temps est, paraît-il, exceptionnel. Nous sommes encore en pleine saison des pluies, et ce ciel éternellement serein est d’un mauvais augure ; il faut nous préparer à le payer chèrement d’ici peu. Le pays devient de plus en plus accidenté, nous approchons de la chaîne de montagnes qui sépare le sud du Liaotoung de la grande plaine de Kaïping. Notre route coupe souvent la voie ferrée et la longe pendant presque toute l’étape d’aujourd’hui. Lorsque les cahots de la voiture me fatiguent par trop, je vais me dégourdir les jambes en marchant entre les rails.

Nous étions tous arrivés ici avec l’impression généralement répandue en Europe que le Transsibérien avait été construit trop vite et sans soin. Les pots-de-vin et les majorations de factures avaient présidé à l’établissement des marchés entre les fonctionnaires