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a vu à une Cour impériale des étrangers paraître dans des costumes aussi baroques. Seuls les attachés navals en uniforme font bonne figure ; les malheureux civils, à qui on avait promis, avant le départ du Japon, des combats et non des réceptions, ont eu toutes les peines du monde à découvrir au fond de leurs malles de quoi composer des costumes de gala : il y a quelques habits noirs, mais surtout des smokings, et même des tuniques khaki environnées par les redingotes crasseuses des reporters japonais. Un des correspondants américains, pour ne pas mettre des bottines jaunes en même temps qu’un frac, a dû emprunter de gros souliers de marche au soldat qui montait la garde à la porte de la légation des États-Unis.

Le chargé d’affaires du Japon, remplaçant le ministre Hayachi en congé à Tokio, fait les honneurs comme s’il était chez lui. Il nous présente en deux lots : d’abord les attachés, puis les députés et les journalistes. Sur une petite estrade dressée au fond de la salle se tiennent l’empereur et le prince impérial. Tous deux portent la robe blanche de deuil, au lieu des costumes couleur safran dont ils s’habillent ordinairement. Ils sont coiffés du chapeau bizarre de la dynastie chinoise des Min, dont descend la maison régnante de Corée. L’empereur est un petit homme à l’aspect jovial et débonnaire ; il sourit