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brables guérites qui encombrent la ville, dans des attitudes aussi diverses que fantaisistes ; leur position favorite consiste à se coucher sur le ventre en fumant une longue pipe. Le fusil repose à quelques pas de son propriétaire. La baïonnette ne quille jamais le bout du canon. J’attribuai naïvement cette coutume aux instructeurs russes qui les premiers oui tenté de transformer quelques Coréens en soldats ; mais cette dernière illusion devait s’évanouir comme les autres. On me fit remarquer, en effet, qu’aucun des fantassins n’avait de fourreau au ceinturon ; c’est une économie qu’a réalisée l’entrepreneur chargé des fournitures d’armes et qui oblige l’infanterie de Séoul à arborer un air martial dont elle se passerait volontiers.

L’armée coréenne compte peu de soldats, beaucoup d’officiers et énormément de généraux. Ce personnel est rarement payé ; il en résulte que la discipline ne répond guère aux idées occidentales. Dernièrement, à la suite d’un raid de cosaques dans le district d’Andjou, le Gouvernement de Séoul, obéissant aux conseils (c’est le terme officiel) du ministre du Japon, fit donner l’ordre à un bataillon de se rendre dans la province envahie. On comprend aisément l’indignation qui s’empara des soldats lorsqu’ils apprirent qu’on les envoyait à un endroit où peut-être s’échangeraient des coups de feu ; néanmoins, le bataillon