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le Gouvernement et la légation française. Pour les calmer, on leur a promis qu’ils seraient les premiers à être échangés.

La note comique est donnée par un capitaine amené il y a quelques jours des environs de Port-Arthur. Depuis qu’il est tombé aux mains de l’ennemi, il n’a cessé de menacer ses gardiens des terribles représailles qui les attendent et de leur dépeindre la facilité avec laquelle les Russes en viendront à bout. Impatienté, un officier japonais lui demanda pourquoi, dans ces conditions, il s’était rendu à de si pitoyables adversaires.

— C’est bien simple, répondit le Moscovite, ce sont des soldats du train qui ont fait le coup ; ils n’étaient pas armés, j’ai eu scrupule à les massacrer.

— Fort bien, dans ce cas notre situation est simplifiée, reprit le Japonais ; nous n’enverrons à Port-Arthur que des coolies et vous procurerons quelques compagnons sans que cela nous coûte grand’chose.

Depuis ce jour, le capitaine n’a plus échafaudé de prophéties sur les opérations futures.

Les autres prisonniers contrastaient avec ces quelques exceptions par leur attitude digne et réservée ; ils paraissaient à la fois heureux de voir des visages européens et gênés de la manière dont on les exhibait comme des fauves en cage. On avait réparti pour la circonstance les passagers du Man-