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la rénovation poétique qui prétendit à modifier son œuvre et à retoucher sa technique du vers. On sait d’Hugo qu’il qualifia Arthur Rimbaud de Shakespeare enfant, qu’il eut un mot aimable pour Stéphane Mallarmé, à l’apparition de l’Après-midi d’un Faune, l’appelant le poète impressionniste. Mais ce qu’il connaissait de Rimbaud et de Mallarmé ne modifiait pas l’instrument lyrique, n’interrompait point le règne du Romantisme poétique, qui durait, non tel qu’il l’avait fait, mais augmenté et embelli, en dehors de lui, par Gautier, Vigny, Baudelaire, Leconte de Lisle et Banville.

Il vaut mieux d’ailleurs qu’il en ait été ainsi, et que le grand survivant de l’admirable période de 1830 soit mort sans avoir rien su de l’évolution qui se formulait, encore que Léon Cladel eût, dit-on, profité d’instants où les Épigones favoris surveillaient de moins près la conversation pour lui apprendre l’ascension, dans les esprits nouveaux, de Charles Baudelaire. Mais, encore une fois, ce grandissement de Baudelaire n’était point absolument un échec pour la technique romantique, ni pour sa conception de la mise en œuvre des territoires lyriques.

Stéphane Mallarmé a dit excellemment :

« Hugo, dans sa tâche mystérieuse, rabattit toute la prose, philosophie, éloquence, histoire, au vers, et comme il était le vers personnellement, il confisqua chez qui pense, discourt ou narre presque le droit à s’énoncer… Le Vers, je crois, avec respect attendit que le géant, qui l’identifiait à sa main tenace et plus ferme toujours de forgeron, vînt à manquer, pour, lui, se rompre. Toute la langue, ajustée