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LE VERS LIBRE

ainsi dire à les citer, à les énumérer. Plutôt que de donner toutes les racines et toutes les lignes d’une métaphore, nous préférons évoquer toute la série mobile des métaphores qu’une sensation entraîne avec elle, encore une fois, dans les limites de nos forces. Et d’ailleurs il faut toujours dans cette évocation multiple, qui fait la marge de rêverie de nos poèmes, et leur donne ou veut leur donner un accent prolongé (ainsi seulement la métaphore est complète, comme un accord n’est complet qu’avec son prolongement) donner quelque vibration qui émane du texte sans y être absolument énoncée, ou tout à fait épuisée. C’est ce qu’on nous a parfois reproché en nous disant que nous manquions de carrure, que nous n’appuyions pas assez, mais quand on nous accordait la carrure (que nous savions obtenir aussi) on nous jetait à la tête la monotonie de nos moyens, et si c’était trop étrange, on se rattrapait en nous rejetant à la tête les rythmes boiteux. Le rythme était boiteux parce que non régulier. Les intéressés préféraient dire boiteux au lieu de dire libres. Il y a dans cette dififérence d’expression toutes nos