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LE VERS LIBRE

Il y avait aussi ceux qu’on appelait les vivants : Jean Richepin, solide rhétoriqueur, doué de tant de verve et de goût, Théocrite des gueux, Don César de Bazan des bohèmes, dépenaillé d’or et de pourpre.

Mais la question n’était pas là ; ces beaux talents étaient isolés dans une masse turbulente et grise.

Tous les jours l’homme qui bêche (celui qui travaille sur les couvertures des livres de Lemerre) soulevait de terre des paniers de tessons de bouteilles rejetés des palais des maîtres, et de ce verre cassé faisait des volumes de vers.

Il y avait partout des poètes qui tous faisaient le même vers.

J’ai conté jadis qu’un très brave homme, qui n’était pas un lyrique énorme, Emmanuel des Essarts, en avait fait pour la gloire du Parnasse le dénombrement. Après avoir cité ceux de Paris en un long article, il énumérait dans un plus long article ceux de province.

Il y en avait dans toutes les villes ; on eût pu, grâce à lui, réviser le Dictionnaire des communes de France en ajoutant, après le nom de la ville