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poésies.

POÉSIES.


Sur le vin fait avec de l’orge[1].

Quoi ! tu te dis Bacchus, ô breuvage imposteur ?
Je ne te connais point : le Bacchus véritable,
Enfant de Jupiter, du nectar a l’odeur ;
Toi tu n’as que du bouc le parfum détestable.
Le Gaulois que le ciel a privé de raisin
Te produit dans ses brocs avec l’aide du grain.
Don offert par Cérès au tranchant des faucilles,
Je ne vois pas en toi la liqueur de Bacchus ;
Et comme tu nourris plus que tu ne petilles,
Je t’appelle Bromos, et non pas Bromius[2].

Sur un orgue[3].

Il s’offre à mes regards de singuliers pipeaux :
C’est dans un sol d’airain qu’ils ont pris la naissance.
L’homme de les gonfler n’aurait pas la puissance :
Il faut un air lancé par des cuirs de taureaux,
Et qui pénètre au fond des plus légers tuyaux.
Cependant un artiste, aux mouvements agiles,
Laisse glisser ses doigts, prompts comme des éclairs ;
Et la touche, adaptée aux chalumeaux dociles,
Exhale, en bondissant, d’harmonieux concerts.

  1. Autrement dit la bière.
  2. Βρόμος est une espèce d’orge ou d’avoine ; Βρόμιος, frémissant, est un surnom de Bacchus.
  3. Voyez t. XX de la Société des Antiquaires de France. — Cf., pour les détails techniques relatifs à cette pièce, dans le Journal des maîtrises du 15 septembre 1862, un article élégant et érudit de M. Félix Clément, l’un des rédacteurs en chef.