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Remarques sur ce tableau.

Tout d’abord, nous devons remarquer que les formes ĕ́v et īv permutent très souvent suivant les dialectes wallons. On a aussi bien chantîve (à Roclenge sur Geer, notamment), que magnéve (à Malmedy).

L’observation de Stürzinger[1], qui s’étonne de ne pas rencontrer la forme en īv dans les verbes en ī = ier tombe par là même.

Dans les anciennes chartres, on trouve cet éve, à côté de la forme en oit prédominante (avenoit, estoit, pooit, etc.).

Au pluriel, la forme primitive n’est pas îs (ī). Mais (ĩ) ins (dans les chartres iens et iemes). Cette forme ins s’est conservée jusqu’à la fin du siècle dernier à Liège. Elle se retrouve encore de temps à autre à Liège au commencement de ce siècle et elle existe encore actuellement en Hesbaye et dans le Condroz. Toutefois les deux formes se sont confondues, car nous remarquons dans l’ode de 1620[2] sçâris ; dans le sonnet liégeois au ministre (1622) frî et euxhî ; dans la moralité de 1623, voirrin et vorîs ; dans la Désolation des pauvres paysans liégeois (1635), happin. En admettant qu’il ne s’agisse pas là de fautes de copiste, on pourrait en conclure que l’emploi des formes îs et ins en wallon dépend de la diversité même des dialectes. Mais il nous semble prouvé que, pour Liège au moins, la forme en ĩ (ins) a prévalu jusqu’au commencement de ce siècle.

Le phénomène iez = îs (ī) est connu.

La forme en ivèt (īvĕ̀) employée dans certains dialectes, correspond à celle de l’ancien bourguignon : event, dont l’ent a dû se prononcer (v. plus haut à propos du présent de l’indicatif). La forme en ît (ī) 3e pers. plur. est analogique.

  1. Loc. cit., p. 208.
  2. Bull. Soc. wall.