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le texte était rempli de noms indiens de lieux, d’hommes et de choses, figurés par des sons chinois dont la valeur phonétique n’avait pas encore été déterminée à l’aide d’exemples corrects et par

    mérite de fonder en France. La haute estime que professent à bon droit les orientalistes pour M. Abel-Rémusat, ne doit pas les empêcher d’être très-réservés et très-circonspects lorsqu’ils citent son Fo-koue-ki. En effet, cet ouvrage, très-recommandable pour l’époque où il a été publié, n’est pas sans dangers pour les personnes qui ne sont pas en état de vérifier ses traductions sur le texte chinois. Je me contenterai de citer quelques exemples. Faute de connaître une importante règle de position grammaticale, dans les passages relatifs à la dimension des statues, il a constamment pris les fractions pour des nombres entiers, comme si l’on disait en français, 50 mètres (150 pieds) au lieu de 1m, 50 (4 pieds 1/2). Ainsi, p. 34, 1 tchang 8 (pieds) ou 18 pieds chinois (le tchang vaut 10 pieds chinois), devienent à ses yeux 8 tchang ou 80 pieds chinois ; p. 148, 1 tchang 6 (pieds) ou 16 pieds chinois, équivalent, selon lui, à 6 tchang (60 pieds chinois).

    Dans les livres bouddhiques des Chinois, le mot indien Bôdhi (Intelligence), le principal attribut du Bouddha, a pour équivalent Tao, , qui a une signification particulière chez les Tao-sse, et de là est venu, depuis la dynastie des Tsin jusqu’à celle des Song (265-420 après J. C), l’usage de donner aux religieux bouddhistes le nom de Tao-jin 道人 « les hommes de l’Intelligence », ou « prétendant à l’Intelligence », qui est considérée comme le plus haut degré de la perfection. Abel-Rémusat, ignorant cette importante acception, a pris les Tao-jin 道人 (c’est-à-dire les religieux bouddhistes, souvent cités par Fa-hien) tantôt pour des prêtres de la secte de Lao-tseu, chez qui il expliquait le mot Tao par raison, λόγος (Fo-koue-ki, pag. 22), tantôt pour des voyageurs ou hommes en chemin (ibid. p. 98), parce que Tao signifie souvent « voie, chemin ». Klaproth a été beaucoup plus loin, lorsqu’il avance (ibid. p. 230) que le Richi Asita, qui tira l’horoscope de Çâkyamouni, au moment de sa naissance, était un Tao-