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VIE ET VOYAGES DE HIOUEN-THSANG.

Devant le couvent du pic oriental de la montagne, il y a un Stoûpa. Ce couvent s’appelle Seng-so-kia-lan (Hañsa sam̃ghârâma). Jadis les religieux de ce couvent suivaient la doctrine du petit Véhicule, appelée la doctrine graduelle, et faisaient usage des trois aliments purs. Un jour, le Bhikchou, qui était l’économe du couvent, n’ayant pu se procurer les provisions nécessaires, se trouva dans la plus grande perplexité. Il vit en ce moment une troupe d’oies qui volaient dans les airs. Les ayant regardées un instant, il s’écria en riant : « Aujourd’hui, la pitance des religieux manque complètement ; mahâsattvas (nobles êtres), il faut que vous ayez égard aux circonstances. »

À peine avait-il achevé ces mots, que le chef de la troupe tomba du haut des nuages, comme si on lui eût coupé les ailes, et vint rouler au pied du Bhikchou (de l’économe). Celui-ci, rempli de confusion et de crainte, en informa ses confrères, qui ne purent lui répondre qu’en versant des larmes et en poussant des sanglots : « Cet oiseau, dirent ils entre eux, était un Bôdhisattva ! et nous, comment oserions-nous le manger ? Quand Jou-laï (le Tathâgata) a établi ses préceptes, il a voulu, par degrés, nous détourner du mal. Mais nous, nous nous sommes attachés à ses premières paroles, qui n’avaient d’autre but que de nous attirer d'abord à lui, et nous les avons prises pour une doctrine définitive. Insensés que nous sommes ! nous n’avons pas osé changer de conduite, et par là, nous avons causé la mort de cet oiseau. Dorénavant, il faut suivre