Page:Julie Philosophe, 1886.djvu/65

Cette page a été validée par deux contributeurs.
— 55 —

Pour moi, le lendemain de la catastrophe, j’avais peine à croire que je veillasse. Toutes mes idées se confondaient. Je versais des larmes sur la mort tragique de notre pauvre major, mais je ne plaignais point le coupable et trop cruel Docteur. Ma mère seule s’attendrissait sur son sort et ne pleurait point le défunt ; il paraît que née pour le plaisir, tout ce qui lui en procurait se divinisait à ses yeux, et le présent effaçait facilement les impressions du passé. Combien de femmes lui ressemblent ! Il faut rendre justice aux hommes, ils sont infiniment moins dépravés que nous.

Darmancourt ne tarda pas à être instruit d’une partie de notre aventure malheureuse, et vint encore pour me consoler. Fidèle à ses principes de religion, il voyait dans tout cela, disait-il, le doigt de Dieu qui conduisait les événements : j’avais de la peine à concevoir qu’il y eût une providence qui se mêlât de ceux de cette nature, en même temps que je