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d’avoir les prémices du cœur de ce jeune homme, voilà à quoi se bornaient mes idées et mes désirs ; mais insensiblement le mien se mit de la partie, et je ne tardai pas à ressentir pour ce jeune homme tout ce qu’il semblait éprouver pour moi. Si Jérôme cherchait toutes les occasions de me voir, de me parler, de mon côté sa présence me causait un contentement, une joie qui augmentaient de jour en jour ; lorsqu’il était éloigné j’éprouvais une espèce de malaise ; lorsque les travaux de la campagne l’appelaient au dehors, j’étais inquiète, ennuyée, chagrine. Je tentais en vain de me distraire par la lecture, l’image de Jérôme se présentait sans cesse à mon esprit ; elle se gravait sur chaque page de mon livre ; enfin ma sensibilité, que je croyais épuisée, s’était ranimée avec une nouvelle force ; et un paysan, le fils d’un fermier, avait opéré ce prodige.

Qu’on ne s’en étonne pas ; l’homme primitif, l’homme orné de ses seules vertus naturelles, plaît plus à la femme

  
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