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que j’avais faite, et par les reproches cruels que je me faisais ; cependant les douces remontrances, les tendres consolations du pasteur du lieu chez lequel j’étais, parvinrent insensiblement à modérer mon affliction. La religion, ce motif puissant qui a toujours plus ou moins de poids sur nous, me détermina à supporter une vie que Dieu n’avait point encore voulu m’ôter.

Lorsque je fus entièrement rétabli, je pris congé du bon curé à qui je devais le salut de mon corps et la tranquillité de mon âme, et je revins dans ma patrie pour y exécuter deux résolutions que j’avais prises. Je vendis tous mes biens que je réalisai en espèces, j’en donnai la plus grande partie aux plus pauvres de mes parents, ne me réservant que ce qu’il me fallait pour l’exécution de mon projet. L’aventure tragique qui m’était arrivée avait fait beaucoup de bruit, on en parlait diversement ; comme on savait que le Comte avait aimé Emilie, on le soupçonnait d’être