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ne peuvent vous aimer. L’âme forte se plie aux circonstances, mais elle ne s’en laisse pas maîtriser.

Je devins donc la maîtresse du premier Ministre d’une République naissante ; je me ressentis bientôt de la validité de ce titre. M. Vander Noot me fit meubler une jolie maison dans un quartier peu fréquenté de Bruxelles ; tout y respirait le luxe et l’abondance. Le président venait me voir presque tous les jours, mais toujours incognito et sous le voile du plus grand mystère : je supposai d’abord que la place éminente qu’il occupait exigeait qu’il sauvât les apparences, et qu’il avait d’autant plus de précautions à prendre, que les Brabançons sont naturellement portés à la dévotion, et conséquemment aisés à scandaliser, quoiqu’ils n’en soient pas pour cela meilleurs que d’autres, mais je ne tardai pas à être instruite du principal motif de cette réserve excessive. M. Vander Noot vivait depuis longtemps avec une veuve fort aimable et fort spirituelle ;