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à la ronde, je l’ai flairée, et j’ai tourné de ce côté mon nez reconnaissant…


Je ne me souviens plus du chemin, je ne sais par où je passais, comment finissait la ville.

Je me rappelle seulement que je me trouvais le long d’un fossé qui sentait mauvais, et que je marchais à travers un tas d’herbes et de plantes qui ne sentaient pas bon.

J’arrivais dans le pays des jardiniers. Que c’est vilain, le pays des maraîchers !

Autant j’aimais les prairies vertes, l’eau vive, la verdure des haies ; autant j’avais le dégoût de cette campagne à arbres courts, à plantes pâles, qui poussent, comme de la barbe de vieux, dans un terrain de sable ou de boue, sur le bord des villes.

Quelques feuilles jaunâtres, desséchées, galeuses, pendaient avec des teintes d’oreilles de poitrinaires.

On avait déshonoré toutes les places, et l’on dérangeait à chaque instant un tourbillon d’insectes qui se régalaient d’un chien crevé.

Pas d’ombre !

Des melons qui ont l’air de boulets chauffés à blanc ; des choux rouges, violets, — on dirait des apoplexies, — une odeur de poireau et d’oignons !


J’arrive chez M. Soubeyrou.

Je reste, avec le petit malade, dans la serre.

Il est tout pâle, avec un grand sourire et de longues dents, le blanc des yeux taché de jaune ; il me mon-