Pour la goutte, Moustache !
Je n’y arriverai jamais ; je m’exerce pourtant !
Pour la goutte, Moustache !
J’ai essayé toutes les inflexions de voix ; je me suis écouté, j’ai prêté l’oreille, travaillé devant la glace, fait le geste :
Pour la goutte…
Non, je ne puis !
Mais, chaque fois que je passe devant Moustache, je m’arrête à le regarder ; je m’habitue au feu, je tourne et retourne autour de sa boîte à décrotter ; il m’a même crié une fois :
Cirer vos bottes, m’ssieu ?
J’ai failli m’évanouir.
Je n’avais pas deux sous, — je n’ai pu les réunir que plus tard dans une autre ville, — et je dus secouer la tête, répondre par un signe, avec un sourire pâle comme celui d’une femme qui voudrait dire : « Il m’est défendu d’aimer ! »
Au fond du Breuil est la tannerie avec ses pains de tourbe, ses peaux qui sèchent, son odeur aigre.
Je l’adore, cette odeur montante, moutardeuse, verte — si l’on peut dire verte, — comme les cuirs qui faisandent dans l’humidité ou qui font sécher leur sueur au soleil.
Du plus loin que j’arrivais dans la ville du Puy, quand j’y revins plus tard, je devinais et je sentais la tannerie du Breuil. — Chaque fois qu’une de ces fabriques s’est trouvée sur mon chemin, à deux lieues