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Celui qui recevait les cartes faillit tomber de son haut et me chercha sous mon chapeau, interrogea ma redingote, leva les mains au ciel.


J’entrai dans la salle.

J’avais ôté mon chapeau en le prenant par les poils ; j’étais reconnaissable, c’était bien moi, il n’y avait pas à s’y tromper, et je ne pus jamais dans la suite invoquer un alibi.

Mais, en voulant monter par-dessus un banc pour arriver du côté de ma classe, voilà un des sous-pieds qui craque, et la jambe du pantalon qui remonte comme un élastique ! Mon tibia se voit, — j’ai l’air d’être en caleçon cette fois ; — les dames, que mon cynisme outrage, se cachent derrière leur éventail…

Du haut de l’estrade, on a remarqué un tumulte dans le fond de la salle.

Les autorités se parlent à l’oreille, le général se lève et regarde : on se demande le secret de ce tapage.

« Jacques, baisse ta culotte, » dit ma mère à ce moment, d’une voix qui me fusille et part comme une décharge dans le silence.

Tous les regards s’abaissent sur moi.

Il faut cependant que ce scandale cesse. Un officier plus énergique que les autres donne un ordre :

« Enlevez l’enfant aux cornichons ! »


L’ordre s’exécute discrètement ; on me tire de dessous la banquette où je m’étais tapi désespéré, et la femme du censeur, qui se trouve là, m’emmène, avec