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V

LA TOILETTE


Un jour, un homme qui voyageait m’a pris pour une curiosité du pays, et m’ayant vu de loin, est accouru au galop de son cheval. Son étonnement a été extrême, quand il a reconnu que j’étais vivant. Il a mis pied à terre, et s’adressant à ma mère, lui a demandé respectueusement si elle voulait bien lui indiquer l’adresse du tailleur qui avait fait mon vêtement.

« C’est moi », a-t-elle répondu, rougissant d’orgueil.

Le cavalier est reparti et on ne l’a plus revu.

Ma mère m’a parlé souvent de cette apparition, de cet homme qui se détournait de son chemin pour savoir qui m’habillait.


Je suis en noir souvent, « rien n’habille comme le noir, » et en habit, en frac, avec un chapeau haut de forme ; j’ai l’air d’un poêle.

Comme on dit que j’use beaucoup, on m’a acheté, dans la campagne, une étoffe jaune et velue, dont je