ce que je veux. C’est un quart d’heure de bonheur indicible ! Je ne l’ai pas encore connu ; ma jeunesse s’éveille, ma mère dort.
… Ma jeunesse s’éteint, ma mère est éveillée !
Elle apparaît comme un spectre dans la cabine, — elle était dans celle du fond, nous sommes dans celle du devant, — elle vient droit à nous, et va commencer une scène.
Mais bah ! le tapage couvre sa voix. — Les garçons vont et viennent, le cuisinier passe avec ses plats, les sous-officiers rôdent avec des bouteilles sur le cœur ; il y a une farce qui part, une chanson qui éclate, un vacarme, un tohu-bohu ! Sa fureur fait long feu.
« Seule de femme, » elle est d’avance sûre d’être vaincue ; puis, elle a vu de l’argent dans la main de mon père, qui paye les pieds de cochon.
« Oui, nous avons de l’argent, dit mon père, guilleret et narquois, et il crie :
— Une bouteille de ce jaune-là !
— Je n’ai pas soif.
— Mais, moi, j’ai soif. — Jacques a soif aussi. As-tu soif ? »
C’est la riposte joyeuse au trait de la veille ; il y met de la malice, pas de méchanceté, le vin l’a rendu bon.
« Et vous, Madame ? » fait-il en tendant un verre et la bouteille.
Il n’y a pas moyen de se fâcher. Ma mère ne s’y