imbécile, grand niais, quand, devant la petite bête morte, j’éclatai en sanglots, sans oser toucher son corps froid et descendre le panier en bas comme un cercueil !
J’avais demandé qu’on attendît le soir pour aller l’enterrer. Un camarade m’avait promis un coin de son jardin.
Il me fallut la prendre et l’emporter devant ma mère, qui ricanait. Bousculé par mon père, je faillis rouler avec elle dans l’escalier. Arrivé en bas, je détournai la tête pour vider le panier sur le tas d’ordures, devant la porte de cette maison maudite. Je l’entendis tomber avec un bruit mou, et je me sauvai en criant :
« Mais puisqu’on pouvait l’enterrer ! » C’était une idée d’enfant, qu’elle n’eût point la tête entaillée par la pelle du boueux ou qu’elle ne vidât pas ses entrailles sous les roues d’un camion ! Je la vis longtemps ainsi, guillotinée et éventrée, au lieu d’avoir une petite place sous la terre où j’aurais su qu’il y avait un être qui m’avait aimé, qui me léchait les mains quand elles étaient bleues et gonflées, et regardait d’un œil où je croyais voir des larmes son jeune maître qui essuyait les siennes…