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de terre brûlée par le haut, à cause du serre-tête noir, et par le bas, à une pomme de terre abandonnée ; j’en ai trouvé une gonflée, violette, l’autre matin, sous le fourneau, qui ressemblait à grand’tante Agnès comme deux gouttes d’eau.

« Vœux d’innocence. »

Ma mère fait si bien, s’explique si mal, que je commence à croire que c’est malpropre d’être béate, et qu’il leur manque quelque chose, ou qu’elles ont quelque chose de trop.

Béate ?

Elles sont quatre « béates » qui demeurent ensemble — pas toutes avec des poireaux couleur de feu sur une peau couleur de cendre, comme grand’tante Agnès, qui est coquette, mais toutes avec un brin de moustache ou un bout de favoris, une noix de côtelette, et l’inévitable serre-tête, l’emplâtre noir !

On m’y envoie de temps en temps.

C’est au fond d’une rue déserte, où l’herbe pousse.

Grand’tante Agnès est ma marraine, et elle adore son filleul.

Elle veut me faire son héritier, me laisser ce qu’elle a, — pas son serre-tête, j’espère.

Il paraît qu’elle garde quelques vieux sous dans un vieux bas, et quand on parle d’une voisine chez qui l’on a trouvé un sac d’écus dans le fond d’un pot à beurre, elle rit dans sa barbe.

Je ne m’amuse pas fort chez elle, en attendant qu’on trouve son pot à beurre !

Il fait noir dans cette grande pièce, espèce de gre-