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rer Dieu, ne demandent pas apparemment que leurs réunions soient secrètes. Ils se réuniront en plein jour, dans un lieu public, sous les yeux de leurs concitoyens, sous la surveillance des magistrats[1]. Quand on vient, à propos de ces réunions solennelles, parler d’associations secrètes, de conciliabules politiques sous une forme religieuse, d’attentat à la morale publique, d’impuissance des lois répressives contre un culte naissant, publiquement professé, sans racines dans le sol, et sans autre appui qu’un troupeau d’adeptes nécessairement restreint, ne comprend-on pas à quelle exagération l’on s’abandonne, et quels misérables prétextes on oppose à la revendication d’un droit sacré ?

Oui, c’est un droit, et ce qui le prouve, c’est que ses adversaires invoquent contre lui, en plein dix-neuvième siècle, les mêmes arguments qu’on opposait à la liberté naissante, quand il s’agissait en 1789 d’ébranler le principe tyrannique des religions d’État. On nous parle d’unité religieuse, quand nous invoquons la liberté de penser. On nous menace d’un abaissement du sentiment religieux par le spectacle de sectes dissidentes[2] ! Vaine prudence, qui demande à la fois l’injuste et l’impossible ;

  1. Décret du 7 vendémiaire an IV, La Convention nationale considérant que les lois auxquelles il est nécessaire de se conformer dans l’exercice des cultes…. doivent exiger des ministres de tous les cultes une garantie purement civique contre l’abus qu’ils pourraient faire de leur ministère pour exciter à la désobéissance aux lois de l’État.
     Art. 17. L’enceinte choisie pour l’exercice d’un culte sera indiquée et déclarée à l’adjoint municipal dans les communes au-dessous de cinq mille âmes ; et dans les autres, aux administrations municipales de canton ou arrondissement. Cette déclaration sera transcrite sur le registre de la municipalité ou de la commune, et il en sera envoyé expédition au greffe de la police correctionnelle du canton. Il est défendu à tous ministres du culte et à tous individus d’user de ladite enceinte avant d’avoir rempli cette formalité.
  2. « Qu’est-ce qui rehausse le caractère national ? C’est la préoccupation des choses de l’âme. Il est important pour un pays que ces préoccupations soient vives et profondes. Malheur à un pays dont l’horizon se rétrécit et qui ne s’occupe plus que d’intérêts matériels ! Mais la préoc-