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teint, et d’ici là nous réclamerons constamment les principes fondamentaux de la liberté religieuse, et nous poursuivrons nos efforts pour la faire triompher. »

Ceux qui croient nous donner la liberté de conscience parce qu’ils ne font pas d’enquête sur notre croyance, et ne nous contraignent pas à suivre les exercices d’un des cultes autorisés par la loi, confondent la liberté de n’avoir pas de religion avec celle que nous réclamons d’en avoir une. Louis XIV allait plus loin, je l’avoue, après la révocation de l’édit de Nantes, car il forçait les protestants à assister à la messe. Mais le droit de ne pas mentir à Dieu et aux hommes ne peut être assimilé à la liberté des cultes. Quand, sous la Convention, la Commune de Paris installa ce culte dérisoire de la déesse Raison, il aurait donc suffi, pour que les catholiques fussent libres, qu’on ne les obligeât pas à fléchir le genou devant cette idole, et à chanter des hymnes en l’honneur du matérialisme dans leurs cathédrales profanées ? Non, les catholiques ont été libres, le jour où on leur a rendu la publicité de leur culte. La liberté ne peut s’entendre de la simple pensée d’un dogme renfermé dans le cœur de celui qui l’adopte, et qui par là même, échappant nécessairement à toute investigation humaine, n’aurait pu être l’objet d’une loi soit permissive, soit prohibitive. Professer une religion, c’est la pratiquer en faisant les actes qui constituent l’exercice d’un culte[1]. La surveillance de l’autorité destinée à réprimer les abus du droit, ne doit pas en gêner et en empêcher l’exercice[2].

Mais, dit-on, les catholiques eux-mêmes sont, par le concordat, soumis à l’autorité du gouvernement : leur liberté est limitée et conditionnelle. Au moins peut-on répondre qu’ils ont volontairement consenti à cette condi-

  1. Ce sont les termes mêmes d’un arrêt rendu par la cour royale de Rennes le 1er août 1828.
  2. Arrêt de la cour d’Orléans, 9 janvier 1838. Plaidoyer de M. de Lalorde, p. 18 sqq.