Page:Jules Słowacki, 1927.djvu/21

Cette page n’a pas encore été corrigée

gouvernement s’élabora dans le travail des plantes, puis passant par l’enchaînement des formes, devait pleinement se développer dans la nature humaine.

Et toi, république d’Athènes, pardonne, mais c’est ton origine que je vois dans cette fleur de trèfle, qui se compose de citoyens égaux, séparés et non dans un calice unique, mais sur une seule tige ; au milieu d’eux Thémistocle pourtant, quoiqu’il ne diffère en rien des autres, siège sur le sommet de la pyramide, occupant la place la plus élevée.

C’est la pensée, qui, seule, avait créé jusqu’alors dans l’âme végétale ; alors qu’elle s’avançait le long de la tige, elle comptait jusqu’à trois feuilles, mais dans la fleur elle s’expliquait par la quinte ; c’est sa pensée qui groupa les fleurs autour d’une mère unique, qui créa la famille et le pressentiment de la nationalité. – Il semble que c’était une pensée exclusivement mathématique qui se développait dans les plantes – tandis que le sentiment étonné, cette base essentielle, qui partout est un cœur qui sourd, tirait des qualités acquises par le travail de la pensée, un premier enseignement pour l’œuvre à accomplir encore. Les fleurs et le fruit, pourtant, sont l’effet du travail de ce dualisme des forces de l’âme ; la suavité du produit dernier de ces plantes ou l’âcre venin des baies d’un buisson épineux, relevaient déjà du jugement moral... La pomme, déjà, pouvait être indiquée à l’homme comme symbole exprimant les mérites et les fautes de son âme propre, et l’on pouvait, l’ayant mangée, s’unir soit à l’âme du péché soit à celle du mérite. Quand elle produisit la fleur et le fruit, l’âme possédait déjà la connaissance du bien et du mal, le sentiment du beau et de l’informe, et s’élevait en vertu, ou péchait contre le but dernier de l’âme. Ô, livre premier de la création. Tout est en toi, abîme sans fin de connaissance et de vérité ; sous les voiles qui s’entr’ouvrent lentement, tu montres et révèles tout aux enfants qui s’élèvent à la filiation Divine.

Où s’achève ton œuvre, âme végétale ? Mais c’est dans ta méditation sur un organisme plus parfait, dans la création de l’espèce des plantes, qui, transformée en système nerveux, aurait pu immédiatement apparaître révélée, parmi les êtres organisés. Ce n’est pas, ô mon Dieu, entrevu dans quelque livre, cet insecte, pareil en tout point à une feuille, qui m’éclaira sur le mystère de l’âme ; il pouvait n’être en effet qu’un jeu de la nature, un simple accident de tout ce qui se créait ; mais s’est ce petit pois que je vis, Seigneur, sous une haie, dans un village, sortir d’une graine pourrie, et comme une chenille verte s’avancer prudemment le long de son tuteur. Tout ce dont, âme de la nature, elle put déjà, au Seigneur, de son organisme végétal, faire l’offrande, il semble qu’elle le fit pour une existence plus parfaite. Les nombres impairs exprimèrent en elle, déjà, la perfection dernière de sa pensée ; elle n’y peut apporter désormais ni correction ni amélioration aucune – mais vois, ô Seigneur, comme dans l’oubli de sa propre durée, cette plante chétive,