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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

— Je ne l’ai plus…

— Qu’en as-tu fait ?

— Il fallut le sauver encore, sous les yeux des Allemands, sous les yeux d’un des bandits qui me guettaient… Si j’avais conservé sur moi ces papiers, ils eussent été perdu…

— Alors ?… disait Rolande qui dans ses mains fiévreuses serrait les mains de la fillette.

— Je les ai donnés à Pulchérie…

— Qu’est devenue Pulchérie ?

Rose-Lys eut un geste vague dans la direction de Reims, vers tous les horizons.

— Je ne sais pas… Il a fallu nous séparer…

Rolande eut un sanglot désespéré.

— Je ne te fais aucun reproche, dit-elle… tu n’en mérites pas…

— C’est à cause de ces papiers que deux hommes sont morts, dit Rose-Lys… Jean-Louis et mon père… Et je connais bien ma pauvre Pulchérie… elle aussi mourra, s’il le faut, pour vous les conserver…

— Ah ! s’il ne s’agissait que de moi ! murmurait Rolande… que suis-je ? Mais il s’agit de la France, il s’agit de révéler à l’humanité entière la pourriture de ces cœurs qui ont voulu la catastrophe… Deux morts, au milieu de tant d’autres ! Deux pauvres morts qui, comme tant d’autres, n’ont pas su pourquoi ils sont morts…

Puis, tout à coup, sa voix se fit très douce et frémissante :

— Simon ?

Rose-Lys baissa la tête. Elle avait légèrement pâli.

— Nous sommes séparées du reste du pays… Là-bas, de l’autre côté des lignes allemandes, on va continuer de se battre… Qu’arrivera-t-il ? Sera-t-il tué ? Ou blessé ? Survivra-t-il à tant d’horreurs ? Nous ne le saurons jamais…