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LES ÉCUMEURS DE GUERRE

— Et cette femme qui est dans son lit ?

— Très malade, en danger, et depuis plus d’un mois sans connaissance…

— Où alliez-vous ?

— Nous ne savions pas… on fuyait… pour ne pas tomber entre vos mains.

Le major eut un gros rire qui fit sauter son ventre.

— Nous ne sommes pas des barbares… et la preuve, c’est que vous allez reprendre le chemin de votre village… Désormais, vous n’êtes plus Françaises, vous êtes Allemandes… Je vais vous signer un sauf-conduit… Vous partirez au plus tard demain à la première heure… De quel pays êtes-vous ?

— De Clairefontaine, près de Rethel…

— Nous y sommes passés avant-hier… Rethel n’existe plus…

Pulchérie et Rose-Lys s’enfermèrent dans la chambre de Rolande, qui fut laissée à leur disposition. Une demi-heure après on frappa à coups de pied. Un sous-officier entra. Il était ivre. Il tendit à Rose-Lys un papier où il y avait deux cachets et des signatures. C’était le sauf-conduit annoncé… Et Pulchérie, tremblante, demanda :

— Pourquoi ne partirions-nous pas tout de suite ?

— C’est impossible ! fit Rose-Lys nerveuse.

Elle pensait aux graves paroles de Jean-Louis… et à ce mystérieux dépôt qu’elle savait caché là-bas, dans un petit salon, cachette précaire, derrière un tableau.

Pendant toute la journée, elles entendirent des cris, des chansons et des rires, et des verres étaient brisés, et le champagne sautait avec ses détonations de fête… Puis, les officiers renversèrent les tables. Ils dansèrent. Il n’y avait pas de verrou à la porte de la chambre des pauvres filles et non plus de clef à la serrure. Les ivrognes pouvaient entrer là comme ils voulaient. D’abord elles furent laissées tranquilles,